Le canotier goguenard

Samedi 13 avril, 18 h 50. Le vrai premier jour de printemps est là. Une température aux alentours de 20 degrés, idéale pour manifester et c'est ce que fait la centaine de gens, rue Fondaudège, jupes plissées, drapeau français, enfants sur les épaules : Elle manifeste. Au cri de : " Donnez-nous du boulot pas des mariages homos !". A cheval sur son VTT, ce jeune homme au canotier, observe. Dès qu'on est plus de trois, on est une bande de cons, disait Brassens. Pense-t-il à Brassens, ce porteur de canotier ? N'en croit-il pas ses yeux ? Il patiente, au bord de la rue, semblant regarder passer le vieux monde. Un sourire goguenard aux lèvres. J'aime bien ce mot, "goguenard" : on en a plein la bouche en le prononçant, rien qu'en l'articulant, la raillerie généreuse vous titille les papilles. Avec Brassens, toujours, je reste du côté de ceux qui ne marchent pas au pas. Peut-être une demi-seconde avant d'appuyer sur le déclencheur, je pestai intérieurement contre ce canotier qui me bouchait l'angle avant de me raviser dans la demi-seconde qui suivit et de réaliser que c'était justement lui, l'angle adequat : ce canotier au sourire goguenard comme une authentique bouffée de printemps .