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Le Bordo de Dorso
26 mars 2013

17 ans, rive droite, années 70 : La coupe au bol

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La coupe au bol

Le samedi, il y avait eu boom chez moi.  Cela s’appelait comme cela dans les années 70, les teufs. Un vrai boum boum dans nos cœurs de quinze printemps en fait, même si nous ne le savions pas encore.

Corinne était la meilleure amie de ma sœur Sophie.

Frédéric, mon meilleur pote. J’avais donc roulé une pelle à Corinne sur « The long and winding road » des Beatles et Fred en avait fait de même avec ma frangine lorsque nous le vîmes le lendemain débarquer dans les vestiaires ce dimanche de mars à une demi-heure du coup d’envoi de notre match de foot avec sa coupe de cheveux à la Du Guesclin.

Vannes générales. Son père avait dû poser un bol sur son crâne et couper tout autour pour obtenir un aussi navrant résultat. Fred tirait une gueule d’enterrement. Cela ne faisait pas vingt-quatre heures qu’il sortait avec ma soeurette qui avait promis de venir nous voir jouer avec Corinne et pour la première fois, il me demanda : « Tu crois que Sophie va casser ? »

Pour être franc, ça ne déplaisait à personne que notre beau gosse de service soit beaucoup moins séduisant que d’ordinaire. Mais je l’aimais bien mon pote, alors je lui répondis de ne pas s’inquiéter, qu’il avait toujours ses yeux verts, et c’était pas mentir, bordel, il avait une putain d’émeraude dans le regard à chavirer le cœur de toutes les gonzesses de la rive droite. Le père de Frédéric, Roger, était également l’entraîneur de l’équipe de football de Carbon-Blanc, notre patelin bien aimé. Roger avait la boule à zéro et de sacrés pectoraux, une voix de stentor et un cœur d’or mais dieu que l’écorce était rude !

Roger qui m’aimait bien, se félicitait toutefois que son fils fut élève au lycée Montaigne du cours Victor Hugo pendant que je suivais ma propre scolarité au lycée qui ne s’appelait pas encore François Mauriac, derrière la caserne des pompiers de la Benauge, A son grand soulagement, de l’autre côté du Pont de Pierre : «  C’est toujours ça de gagner, décrétait-il, sur les conneries. » Monsieur Roger était un entraîneur droit et matois, à la psychologie parfois rudimentaire mais unanimement respecté. Un mec qui en avait une bonne paire.

Entrant ce lendemain de baisers sur le terrain, nous eûmes Fred et ma pomme, le même regard vers les tribunes. Sophie et Corinne, aussi blondes l’une que l’autre y étaient effectivement assises. Alors, pour la seconde fois, mon ami demanda : « Tu crois que Sophie va casser ? » et je lui répétai de ne pas s’en faire.

Nous nous disposâmes ensuite comme d’habitude sur le terrain et il est à présent indispensable pour la bonne jouissance des évènements qui vont suivre, de préciser une ou deux choses concernant le déroulement d’une partie de football.  Les onze joueurs d’une équipe sont en effet répartis entre gardien de but, arrières, milieux de terrain et attaquants. Frédéric et moi avons toujours joué respectivement numéro 4 et numéro 11, autrement dit arrière central et ailier gauche. Le numéro 4, chargé de surveiller l’avant-centre de l’équipe adverse évite de tailler une bavette avec le 11 de sa propre équipe prié quant à lui, à l’autre extrémité du terrain, de pourrir la vie de la défense ennemie.

Le phénomène se produisit pourtant à plusieurs reprises cet après-midi historique au stade Gaston Lacoste de Carbon-Blanc. L’évènement pourtant ( et quatre décennies plus tard, je ne m’explique toujours pas comment)  passa inaperçu au regard aiguisé de Roger, entraîneur expert et papa peu complaisant de son stoppeur de fiston. Auquel,  choqué de la désertion de son poste lors de son énième : «  Tu crois que Sophie va casser ? » je finis franchement par répondre : « Avec la tronche que t’as, ça m’étonnerait pas ! » 

Le match achevé, retrouvant Fred douché plutôt deux fois qu’une, Sophie ne cassa point. Ma sœur est une fille bien.

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